Voici une fleur que vous ne trouverez JAMAIS chez un fleuriste : la Rafflésia amoldii .
On dit que c’est la plus grande fleur du monde. Elle pousse dans les forêts vierges du Sud-est asiatique. Son diamètre peut atteindre 70 cm et peser jusqu’à 7 kilogrammes. Elle a été découverte le 20 mai 1818 à Sumatra par deux botanistes, sir Stamford Raffles, qui fondera la colonie anglaise de Singapour en 1819, et son ami Joseph Arnold, naturaliste et ancien chirurgien de la British Navy.
Pourquoi vous en parler aujourd’hui ? Parce qu’après 200 ans ont vient enfin de découvrir sa classification. Ce n’est peut être pas important pour vous, mais les botanistes classent très précisément TOUTES les plantes selon un ordre (que je ne connaît pas) très précis. Les progrès de la science, notamment l’ADN, permettent aujourd’hui une classification plus précise et qui réserve parfois des surprises.
Jugez en plutôt : Ses ancêtres d’il y a au plus 46 millions d’années avaient des fleurs toutes petites. Voilà qui lui confère le record de croissance parmi tous les organismes vivants de la Terre ! Rafflesia arnoldii est une euphorbiacée, cette famille à laquelle appartiennent nos euphorbes et qui compte quelque 6 000 espèces. Annoncée ainsi, la nouvelle ne semble pas fracassante. Elle le paraît davantage quand on considère l’incroyable fleur de cette plante tropicale : son diamètre peut atteindre un mètre et son poids grimpe jusqu’à sept kilogrammes. Dans la forêt, elle se fait remarquer par cette taille hors norme mais aussi par son odeur, pestilentielle mais utile : c’est elle qui attire les insectes se chargeant de sa pollinisation. Elle n’a donc pas grand-chose à voir avec les euphorbiacées, dont les inflorescences dépassent rarement quelques millimètres.
Jusque-là, la position de cette curiosité et de ses cousines, les rafflesiacées, restait une énigme, bien que ces plantes soient connues depuis deux siècles. Il faut dire qu’elles sont parasites, vivant aux dépens de l’arbre sur lequel elles se sont fixées. Elles sont dépourvues de feuilles et de tiges, qui servent justement aux taxonomistes pour situer une plante dans la classification. L’étude génétique n’était d’aucun secours car les botanistes utilisent l’ADN des chloroplastes, ces petites structures intracellulaires qui conduisent la photosynthèse. Or, ils sont absents chez les rafflesiacés. Charles Davis (de l’université Harvard, Etats-Unis), lui, s’est attaqué à l’ADN des mitochondries, des organites (intracellulaires, comme les chloroplastes) et qui s’occupent de la respiration.
Grâce à cet ADN mitochondrial, les rafflesiacées, dans une première étude, ont trouvé leur place parmi les malpighiales, qui comprennent les euphorbiacées. L’équipe de Davis a ensuite analysé 11 500 paires de base dans plus de cent espèces de ce groupe. Dans leur article, publié dans Science, le verdict est clair : les rafflesiacés appartiennent aux euphorbiacées.
Si peu de millions d’années pour grandir…
Pour déterminer quand les ancêtres des rafflésiacées ont commencé à faire grandir leurs fleurs, l’équipe a étudié les fossiles connus d’euphorbiacées. Selon les auteurs, les rafflésiacés ont commencé à diverger des autres euphorbiacées il y a 46 millions d’années. L’énorme augmentation de taille n’a donc pu se produire qu’à partir de ce moment. Le manque de fossile de rafflésiacées empêche de savoir quand a débuté cette croissance. Elle pourrait donc être plus récente.
Même si elle date de 46 millions d’années, cette tendance au gigantisme étonne. La raison semble en être la meilleure efficacité de la production et de la diffusion du parfum, repoussant pour un nez humain mais attractif pour les insectes pollinisateurs. Mais la question restant en suspens est celle de la vitesse du changement, très élevée vue l’ampleur de la modification. « L'échelle de cette évolution est inédite dans le règne végétal et dépasse même tout ce qui se fait dans le monde vivant, explique Daniel Nickrent, l’un des coauteurs. » Entre la taille des fleurs des ancêtres des rafflésias et celle des espèces actuelles, poursuit-il, « c’est comme comparer un homme et la pyramide de Gizeh ».
En rapprochant ce groupe d’euphorbiacées actuelles, les chercheurs espèrent qu’il sera possible de déterminer quels gènes se sont modifiés pour provoquer ce gigantisme. Rafflesia a donc encore des secrets à révéler.
Sources : Jean-Luc Goudet - Futura-Sciences
On l’appelle aussi lys parasite nauséabond
En voici quelques exemplaire, plus un exemplaire d’une euphorbiacée que vous connaissez bien : le Poinsettia. N’oubliez pas que la fleur est au centre de l’inflorescence et ne mesure pas plus de 5 millimètres de diamètre.